N°251 - Octobre 2009

Le Lien des Cellules de Prière

Éditorial

Voici un numéro centré sur la prière. L’ar- ticle de John Lake nous fait comprendre l’importance d’unir prière et orientation de vie, de se concentrer sur un ou deux objec- tifs de fond à cultiver en soi avec persévé- rance. L’Esprit de Dieu aime habiter la prière de gens décidés et persévérants, dans la mesure toutefois où celui qui prie ne cher- che pas à manipuler le Dieu souverain et vivant par d’inutiles paroles de type «magi- que ». Il s’agit bien plutôt de s’aligner sur ce que le Seigneur révèle. Mais alors, quelle puissance est libérée à long terme !

Le second article permet de nous ressour- cer dans l’expérience et la connaissance des Réformateurs du 16e siècle, en particulier de Luther, concernant la prière. En complé- ment, deux exemples de prières de St. Fran- çois d’Assise et de St. Jean de la Croix.

Nous remercions aussi les lecteurs qui ont été sensibles à notre présentation des finances du Lien, préoccupantes pour l’ave- nir de la publication en 2010. Nous publions quelques réactions dans les « Echos et Nouvelles », lesquelles sont toutes encou- rageantes! Nous allons réfléchir, prier et mettre notre écoute et notre foi en action avec vous. Mais la part des lecteurs, en particulier de ceux qui reçoivent le Lien sans toujours penser à verser le prix de leur abonnement, cette part est réellement indispensable pour continuer. Merci à ceux qui voudront bien intéresser de nouvelles personnes au Lien.

Nous vous bénissons dans la foi qui nous est commune en l’Eternel, et bonne lecture !

Jean-Pierre Besse

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L'appel de l'âme

Extrait d’un sermon de John G. Lake

Dans mon ministère en Afrique du Sud (vers 1920), j’avais un prédicateur du nom de Von Vuuren. Ce nom signifie « Feu ». Von Vuuren avait d’abord été un boucher — charcutier dans la ville de Johannesburg ; il sombra dans l’excès de consommation. Son médecin lui déclara : vous n’avez plus qu’une année à vivre. Sur ce, il renonça à sa boucherie et acheta une exploitation agricole à la campagne pour fournir à sa famille une source de subsistance. Après avoir quitté la ville, il apprit par une lettre de ses amis que beaucoup de gens de Johannesburg étaient baptisés dans la Saint-Esprit (entre autres sa propre nièce), d’autres guéris, d’autres abondamment bénis, etc. Von Vuuren prit la lettre, alla dans les champs, rampa sous un buisson d’épine, déploya la lettre devant Dieu et pria : « Dieu, si tu peux faire de telles choses pour les gens à Johannesburg, tu peux aussi faire quelque chose pour moi ici. Je suis chrétien depuis 18 ans et j’ai prié et prié pour certaines choses qui ne se sont pas produites. Seigneur, si d’autres peuvent être baptisés dans le Saint-Esprit, moi sûrement aussi. Si le coeur d’autres personnes peut être purifié par la puissance divine, cette même puissance peut aussi me purifier. Si d’autres ont pu être guéris, alors, tu peux me guérir aussi ». Alors qu’il se donnait lui-même à Dieu, ayant ouvert son âme au Ciel, soudain, l’Esprit descendit sur lui et il devint la personne la plus transformée que j’aie jamais connue !

Dieu se mouvait à l’intérieur de cet homme. Pendant 18 jours, il allait et venait comme couvert par l’ombre de l’Esprit de Dieu. Le Seigneur parlait constamment à son esprit, le dirigeant vers celui-ci ou celui-là, juges, avocats, hommes d’état et médecins, riches et pauvres. Quand il les trouvait, l’Esprit de Dieu lui communiquait des messages tels que, dans bien des 2 cas, ces hommes tombaient à genoux et se mettaient à verser des larmes. Il raconta aussi que dix-huit ans durant, il avait prié pour une conversion réelle et une transformation de sa femme, sans succès. Mais ce matin-là, quand le Seigneur l’eut baptisé dans son Esprit Saint, une prière nouvelle monta dans son coeur. Une nouvelle profondeur avait été touchée à l’intérieur de lui et, de cette grande profondeur intérieure jaillit une supplication nouvelle à Dieu. Ce matin-là, le cri vers Dieu toucha l’esprit de son épouse et, avant que von Vuuren ait atteint leur maison, elle avait donné son coeur à Dieu. En trois mois, toute sa famille, — sa femme, onze enfants et lui-même — ont été immergés dans le Saint-Esprit.

Dans un autre message, Lake mentionne qu’à cette occasion, von Vuuren pria cette prière céleste et en très peu de temps, dixneuf familles furent baptisées dans l’Esprit. Le Seigneur le remplit si bien de sa gloire qu’il s’entendit dire : « va à Pretoria, je vais t’envoyer vers divers membres du Parlement ». Il fut admis en présence du Premier ministre de l’époque Louis Botha. Botha eut l’occasion de raconter cela par la suite à John Lake en disant :
« Lake, j’ai connu Von Vuuren depuis son enfance. Je l’ai connu comme un garçon téméraire et agité. Mais cet homme est venu à mon bureau et s’est tenu à 10 pieds de distance. Je levai les yeux vers lui et, avant qu’il commence à parler, j’ai commencé à être secoué, ma chaise cliquetait. Je suis tombé à genoux, j’ai mis ma tête sous la table du bureau et j’ai commencé à crier à Dieu. Von Vuuren parlait comme Dieu. Il en avait la majesté. Il était surhumainement magnifique. ».

Heureux les affamés !
La faim, le « désir » dont Jésus a parlé (car quand il parlait de désir, il parlait de l’appel de l’âme) ce désir n’était pas juste celui qui vient de l’homme « extérieur ». Certes il l’inclut aussi. Peut-être qu’au début, ce désir est simplement celui qui vient de la pensée naturelle, mais, alors que les jours et les années passent, la soif d’obtenir mieux grandit dans l’être intérieur et rejoint l’appel de ce qu’il y a de plus profond dans notre nature humaine. C’est ce désir-là dont Jésus a parlé quand il a dit : Heureux sont ceux qui sont affamés et assoiffés pour la justice, oui, ils seront rassasiés ! (Mat. 5.6).

L’oeuvre spirituelle qui prend place à l’intérieur de l’homme réel, ce puissant désir de Dieu, ses voies, son amour, sa connaissance, sa puissance, fait pâlir toute autre chose qui devient secondaire.

Les chefs politiques parlent, dans leur domaine, de « l’intérêt suprême ». Pour eux, c’est l’Affaire qui s’impose d’elle-même au-dessus de toutes les autres, la plus grande, la plus large, la plus importante pour l’intérêt de la nation. C’est « l’intérêt suprême », l’affaire prioritaire.

L’âme aussi recèle en elle son intérêt suprême, son aspiration prioritaire. Et quand le désir de votre coeur spirituel est ainsi intensifié et qu’il absorbe toute votre énergie, alors, vous savez que le temps de la réalisation n’est plus très éloigné. Ce désir est porteur de la réponse. Il est un désir créatif !

Un jour, une femme m’a rendu le témoignage suivant. Elle avait été diagnostiquée sans espoir et allait devenir aveugle. Aucun remède humain ne pouvait lui apporter un bien quelconque. Quelqu’un lui présenta vaguement la possibilité de retrouver la vue par la puissance de Dieu. Cette femme ne fut guère enseignée à ce sujet, mais elle raconta ceci : chaque jour durant quatre ans, elle exprima le désir de son âme de voir à nouveau correctement. Pas seulement l’exprimer avec des mots, mais appeler le pouvoir de Dieu sur elle en sorte que la fonction visuelle soit recréée dans ses yeux. Au bout de quatre ans et demi, elle pouvait dire : « mes yeux sont aussi bons qu’ils l’étaient auparavant »*.

Telle est la récompense de la persévérance d’un désir venant de Dieu et (italique ajouté par le traducteur) tourné vers Dieu Est-ce que notre aspiration vers Dieu est continue ? Si oui, graduellement, les forces divines de la Vie se concentrent et s’alignent elles-mêmes sur cette vigoureuse aspiration. L’Esprit de Dieu opère à travers votre coeur, il est ainsi dirigé par cette aspiration et concentré sur un point focal précis que Dieu vous a mis à coeur ; il s’intensifie chaque jour à cause du désir constant de votre esprit d’obtenir (ndt. : ce que le Seigneur approuve que vous demandiez, cf. 1 Jn. 5.14-15 ; voir aussi Ja. 4.3-4 !). Cette concentration de l’Esprit de Dieu sur notre âme lui apporte, par la grâce de Dieu, tous les éléments nécessaires pour formuler, produire et accomplir le désir de notre coeur. Et, un beau matin, nous nous réveillons en découvrant que nous possédons ce que nous avions demandé.


Faim pour l’essentiel avant tout
Jésus a établi les hommes sur la véritable fondation. Beaucoup désirent seulement la santé, d’autres des bénédictions temporelles.

L’une et les autres sont bonnes et convenables, mais béni soit Dieu, Jésus a fondé la personne humaine sur le seul fondement de départ correct : désirer premièrement la JUSTICE, celle de Dieu, en vue de devenir bénéficiaire du Royaume.
« Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice et toutes choses vous seront données en plus » (Mat. 6.33).

Jésus apporte et produit dans le monde un caractère nouveau, qui peut durer en permanence, une qualité de vie personnelle qui ne faillit pas, une foi qui peut ne plus connaître la défaite. Pour fonder un caractère de cette nature, Jésus a vu qu’il ne pouvait être établi que dans la profondeur de l’être humain, dans son esprit profond. Quand le coeur est enraciné ainsi dans les sentiers de la justice, alors toutes ses activités se trouveront être dans une juste orientation et en harmonie avec les lois de Dieu.

Dieu connaît l’aspiration de son Esprit. D’une certaine manière, en étudiant notre propre esprit, nous comprendrons Celui de Dieu. L’appel de l’Esprit de Dieu est l’appel de la justice, l’appel de la vérité, l’appel de l’amour, l’appel de la puissance, l’appel de la foi.


Ndlr
On ne peut pas tirer de cet exemple un principe général et « automatique » ; le Seigneur montre que ce n'est pas la quantité de paroles qui déclanche l'intervention de Dieu (Mt 6.7-8). Il arrive que quelqu'un reçoive une autre réponse et comprenne qu'il faut passer à autre chose (2 Co 12.8-9) ; mais pour tout ce qui est promis dans l'Ecriture ou révélé personnellement par l'Esprit Saint, la persévérance dans la foi est requise par Jésus lui-même (Lc 18.1-8 et 11.5-13).


Le traducteur du texte précédent (J-P. Besse) vous propose une petite recherche biblique complémentaire à ce texte, basée sur Matthieu 15.21-28

Cette femme païenne — légèrement en dehors du territoire d’Israël — ne connaît Jésus que par la réputation publique. Elle sait qu’il a autorité sur les esprits mauvais et, de ce fait, pense qu’il est peut-être le Seigneur Oint annoncé par les prophètes d’Israël. C’est pourquoi, désirant passionnément le rétablissement de sa fille démoniaque, elle s’adresse au Juif Jésus avec espérance et sans trop de complexes (v.22). Invoquant Jésus comme Seigneur et « fils de David » (titre réservé au Messie), elle expose le cas de sa fille et lui demande d’intervenir...

Mais il y a plusieurs obstacles de taille, les choses ne vont pas être simples !

1) D’abord (v. 23a) Jésus ne lui répond rien ! Ainsi en va-t-il de beaucoup de nos prières : il nous semble pendant tout un temps que le Seigneur n’entend pas. Et souvent, après deux ou trois tentatives infructueuses, nous laissons tomber, non à cause d’une réponse négative de Dieu, mais par indécision ou susceptibilité blessée.

2) En outre, les propres disciples de Jésus, qui savent que le but de ce voyage sur la frontière d’Israël est de faire retraite en secret, n’hésitent pas à suggérer à leur Maître la conduite à tenir : renvoie­la, car elle crie derrière nous ! (Elle va ameuter ). Cette Cananéenne a de quoi se décourager ! Son désir profond sera-t-il le plus fort ?

3) 3e obstacle : Jésus parle enfin (v. 24), mais c’est pour l’avertir que son ministère terrestre se limite au peuple juif et aux résidents de la Maison d’Israël. Donc, elle n’a pas droit à la grâce qui visite Israël à ce moment-là. Crack, boum ! Fini ! Malgré tout, cette femme continue, persévère, insiste, avec humilité il est vrai puisqu’elle se prosterne (v. 25) ! Elle n’est pas arrogante, mais juste persévérante !

4) Jésus reprend la parole, mais c’est encore pour dresser un obstacle, le plus dur peut-être : « il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens ». Qu’auriez-vous fait ? S’entendre comparé à un petit chien et les Juifs aux enfants de la maison, il y a de quoi vexer plus d’un !

5) Or, la femme rebondit ! Sa prière ne s’arrête pas par orgueil nationaliste blessé En fait elle s’approfondit, elle s’aligne de plus en plus sur le plan encore caché de Dieu : la Bonne Nouvelle sera transmise bientôt aux nations, aux païens, aux rejetés, à ceux du dehors ! (v. 27). Oui Seigneur ! Elle s’aligne et faisant cela, elle trouve la faille que Dieu lui laisse ouverte : « pourtant les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres ! » Voilà du bon sens ! Ne pourrait-elle pas avoir déjà un petit acompte, quelques miettes de ce glorieux héritage à venir ?

Alors Jésus va craquer, non par faiblesse, mais parce qu’il reconnaît la démarche de l’Esprit à l’intérieur de cette femme remarquable. Il lui donne une réponse plutôt inhabituelle dans les évangiles ­ et qui va dans le sens du message de John Lake : Femme ta foi est grande, qu’il te soit fait COMME TU LE VEUX, selon ton désir le plus profond, celui qui te vient de la soif de Dieu ! Et à l’heure même sa fille fut guérie !

Cet épisode est prophétique pour nous, Eglise issue des nations païennes. Elle annonce que beaucoup de nos demandes profondes et nécessaires sont rarement exaucées tout de suite. Elles nécessitent un désir de Dieu, une passion pour l’essentiel, le Règne de Dieu et sa justice. Nous ne sommes pas les frères aînés, comme les Juifs messianiques, mais les frères cadets. Ayons cette humilité mais aussi cette foi audacieuse et persévérante qui s’appuie sur la générosité surabondante de Dieu. Oui, sa grâce est immense, déjà maintenant, même si
« c’est en espérance que nous sommes sauvés » (c’est l’avènement du Seigneur qui sera la dimension pleine, totale, éternelle). Alors, que nos prières contribuent à faire descendre le Ciel sur la terre ! Non seulement pour nous-mêmes, mais aussi tout autant pour les autres, nos contemporains, la génération dont nous sommes les prêtres, les prophètes et les serviteurs royaux !

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Quand des Réformateurs de l'Eglise prient

En complément du premier article, nous donnons un extrait d’un excellent ouvrage du pasteur Jacques Blandenier intitulé : « Martin Luther et Jean Calvin : Contrastes et ressemblances » (édition « Je Sème, Excelsis »). Ces lignes sont tirées du chap. 8, en rapport avec la prière. Auparavant quelques lignes d’introduction : Dans les débuts du 16e siècle, le moine allemand Martin Luther, était tourmenté par la recherche d’une justice divine qui donnerait aux pécheurs comme lui, la ferme assurance d’être sauvés, assurance que tous ses efforts religieux et moraux ne lui donnaient pas. A une période donnée, en méditant l'épître aux Romains, il reçut une révélation décisive qui le libéra dans la joie : celle du don gratuit de Dieu à saisir sur la seule base de la foi en Jésus, Sauveur et Seigneur. Peu après ce tournant, il publia des thèses en vue de réformer la pratique et la théologie de l’Eglise d’alors qui en avait le plus urgent besoin. Les autorités toutespuissantes de l’Empire germanique et de la curie romaine (qui dominaient l’Europe d’alors) en eurent connaissance et convoquèrent Luther à Worms, avec le mandat de s’expliquer sur ses déclarations publiques demandant des réformes de fond. Malgré un sauf-conduit de l’Empereur, Luther risquait sa vie en s’y rendant. En effet, un prédécesseur, Jean Hus de Bohème, avait été condamné un siècle plus tôt et brûlé vif malgré un tel sauf-conduit. Le réformateur s’y rendit néanmoins !
Luther, lors de sa comparution à Worms devant les grands de l’Empire (avril 1521), avait paru tout d’abord hésitant et intimidé, demandant un délai de réflexion de 24 heures (pressé qu’il était par des conseillers politiques qui voulaient tenter de trouver un compromis avec l’empereur). Le lendemain pourtant, il se tint devant ses juges, ferme comme un roc dans son refus de renier ses convictions fondées sur la Parole de Dieu. Dans la nuit qui sépare ces deux comparutions, il a connu un combat ardent, dans une prière mise par écrit qu’il est impossible de lire sans émotion — sachant aussi qu’elle a été pleinement exaucée. Mieux qu’un exposé théorique, elle illustre ce que signifiait la prière pour Martin Luther :

O Seigneur Dieu tout puissant ! Quelle chose c’est donc que le monde ! Comme il force les lèvres des hommes ! Comme leur confiance en Dieu est petite ! Que la chair est faible ! Que le diable est puissant ! Combien il travaille par ses émissaires et les sages de ce monde !

Le monde marche dans le large chemin où s’en vont les impies, et il n’a d’yeux que pour ce qui est grand, puissant, magnifique. Si je regarde de ce côté-là, c’en est fait de moi ! ( )Ah Dieu Ah Dieu ! ô mon Dieu ! mon Dieu ! Tiens-toi près de moi contre la raison et la sagesse du monde. Fais-le, fais-le seul. Tu dois le faire ! Ce n’est point ma cause, c’est la tienne. Qu’est-ce que ma personne ici ? Qu’ai-je à faire, moi, avec ces grands seigneurs du monde ? Que n’ai-je aussi des jours tranquilles, sans trouble ? C’est ta cause, Seigneur, ta cause juste, éternelle. Soutiens-moi ô Dieu fidèle, éternel ! Je ne m’appuie sur aucun homme. Tout cela n’est que vanité ; tout ce qui est chair est chair, et tombe. O Dieu ! ô Dieu ! N’entends-tu pas ? Mon Dieu es-tu mort ? Non tu ne peux pas mourir ; tu te caches seulement. Ne m’as-tu pas choisi ? N’est-il pas vrai que jamais de ma vie, je n’aurais pensé à m’élever contre de si puissants seigneurs ?

Ah Dieu, viens à mon aide au nom de ton cher Fils Jésus-Christ, ma force, mon bouclier ; fortifie-moi par ton Saint-Esprit ! Seigneur, où te tiens-tu ? Mon Dieu, où es-tu ? Viens ! viens ! Je suis prêt à y laisser ma vie comme un agneau. Car cette cause est juste et je ne veux pas me séparer de Toi pour l’éternité. Que cela soit décidé en ton nom ; le monde ne pourra pourtant pas forcer ma conscience, quand même il serait plein de diables. Et si mon corps, ta création, l’ouvrage de tes mains, doit tomber en ruine, mon âme est à toi ; elle t’appartient, elle demeurera éternellement à toi. Amen. Ô Dieu soutiens-moi, Amen !
(Cité par Georges Casalis dans « Luther et l’Eglise confessante »).

Le pasteur Casalis fait suivre cette prière par une anecdote significative : « Dans toute la vie de prière de Luther, on retrouve cette familiarité étonnante avec Dieu qui n’a rien de vulgaire ou de blasphématoire, car elle est le fait des très grandes âmes, de celles qui se sont tellement ‘frottées à Dieu’qu’elles savent de quoi elles parlent : alors que son ami Melanchton est malade à la mort, Luther s’enferme dans sa chambre et passe toute la nuit en prière, suppliant Dieu de ne pas lui ôter cet indispensable prochain. Sortant de la chambre au petit matin, le malade étant hors de danger, Luther, épuisé mais triomphant s’écrie pourtant vers le ciel : ‘il a bien fallu que le Seigneur m’écoutât. Je lui ai jeté le sac devant sa porte, je lui ai frotté les oreilles avec toutes ses promesses d’exaucement. Je lui ai dit qu’il fallait qu’il m’écoute pour que j’y croie encore.’ […] Quoi qu’on en pense, la fantastique activité d’un Luther n’est possible que par la mise en oeuvre d’immenses richesses spirituelles auxquelles seule la prière […] donne accès ».

Luther a aussi affirmé, montrant par là qu’il n’était pas un triomphaliste systématique : si ce que nous voulons n’advient pas, adviendra cependant ce qui est le meilleur.

Le docteur Luther savait être très simple pour enseigner aux humbles quand il dit : Le matin, en te levant, sanctifie-toi par le signe de croix et dit : au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Puis debout ou à genoux, tu diras le Credo (le symbole des apôtres) ou l’Oraison dominicale (le Notre Père). Si tu le désires, tu peux joindre cette prière :
« je te rends grâce ô mon Père céleste, par Jésus-Christ ton Fils bien-aimé, de ce que tu m’as gardé de tout mal pendant la nuit qui vient de finir. Je te prie de me préserver encore pendant cette journée de tout mal et de tout péché, afin que ma conduite et toute ma vie te soient agréables. Je remets entre tes mains, mon corps, mon âme et tout ce que je possède. Que ton saint ange me garde et que Satan n’ait aucun pouvoir sur moi. » Puis rends-toi joyeusement à ton travail après avoir, par exemple chanté un cantique ou récité les commandements ou en poursuivant ta méditation.

Il dit encore, dans son « Traité à mon coiffeur » (1534) :

Je m’en tiens, d’une façon aussi précise que possible au sens de ces paroles (il s’agit de celles du Notre Père). Il m’arrive souvent de m’étendre tellement sur une demande de la prière du Seigneur que je néglige les six autres demandes. Quand tant de bonnes pensées nous viennent, il faut laisser le champ libre à ces pensées, les écouter en silence et à aucun prix ne les entraver, car c’est le Saint-Esprit lui-même qui parle dans ce cas. Et une seule de ces paroles vaut infiniment plus que mille prières que nous pourrions formuler. Souvent j’ai appris plus de choses dans une prière que n’auraient pu m’enseigner des lectures et des méditations abondantes.

Citons pour terminer quelques mots de Calvin, dans les tournures modernisées du français de son époque :
Bien que sachant tout d’avance et n’ayant besoin de rien, le Seigneur a voulu cependant que nous le priions : premièrement afin que notre coeur soit enflammé d’un ardent et véhément désir de le toujours chercher, aimer et honorer, en ce que nous accoutumions d’avoir toujours en lui notre refuge ( ) Davantage : afin que nous soyons préparés à recevoir ses bienfaits avec une entière reconnaissance car par la prière nous sommes avertis qu’ils nous viennent de sa main. En outre, afin qu’ayant obtenu ce que nous demandions, nous réputions qu’il a exaucé nos désirs et que, par là, nous soyons plus instamment incités à méditer sa bienveillance ( )

Ne pas invoquer et prier Dieu alors que nous savons qu’Il est le Seigneur, que tous nos biens viennent de Lui et qu’il nous convie à demander ce qu’il nous faut, c’est comme si quelqu’un, sachant qu’un trésor est enfoui dans une terre, le laissait par indifférence, sans prendre la peine de le déterrer.

C’est pourquoi Calvin encourage en premier lieu de ne pas prier sans avoir commencé par se repentir : la prière bien réglée requiert la repentance. C’est une doctrine fort commune dans l’Ecriture que Dieu n’exauce point les injustes […]. Mais avec plus d’insistance encore, il encourage les croyants à s’appuyer sur les promesses de l’exaucement. Le croyant tient ferme, comme à deux mains, cette assurance d’obtenir ce que nous demandons […] ; c’est un fruit inestimable des promesses de Dieu que de Lui pouvoir adresser requêtes, non point en doutes et tremblement, mais qu’étant munis et armés de sa Parole, nous l’osions invoquer Père, puisqu’il nous suggère ce nom tout aimable, sans la saveur duquel sa Majesté nous épouvanterait.


Prière de Saint Jean de la Croix
Homme de prière et théologien espagnol du 16e siècle
Que Jésus soit en votre coeur !
Puisque vous ne me dites rien,
moi je veux vous dire quelque chose, à savoir
Que vous ne donniez plus prise à ces vaines craintes
qui vous mettent dans le découragement.
Laissez à Dieu ce que vous lui avez donné
et ce que vous lui donnez chaque jour.
On dirait que vous voulez mesurer Dieu à votre capacité ;
il ne doit pas en être ainsi.
Préparez-vous à la grande grâce que Dieu veut vous accorder.
 

Prière connue d’un réformateur moral catholique du 12e siècle,
Saint François d’Assise
Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix.
Là où il y la haine, que je mette l’Amour,
Là où il y a l’offense, que je mette le Pardon,
Là où il y a la discorde, que je mette l’Union,
Là où il y a l’erreur, que je mette la Vérité,
Là où il y a le doute, que je mette la Foi,
Là où il y a le désespoir, que je mette l’Espérance,
Là où il y a les ténèbres, que je mette la Lumière,
Là où il y a la tristesse, que je mette la Joie
Fais, Seigneur, que je ne cherche pas tant d’être consolé que de consoler ;
D’être compris que de comprendre ;
d’être aimé que d’aimer,
Parce que c’est en donnant que l’on reçoit ;
C’est en s’oubliant que l’on se trouve ;
c’est en pardonnant que l’on obtient le pardon ;
C’est en mourant que l’on ressuscite à l’éternelle Vie.
Ainsi soit-il.