Le Lien des cellules de prière
291 | Octobre 2019Voulons-nous vraiment le Réveil ?
Aujourd’hui, on prie beaucoup pour un réveil dans nos églises. Mais mesure-t-on ce que cela signifie ? Y sommes-nous prêts ? Le réveil amène toujours des transformations importantes. J’en citerai trois qui me semblent particulièrement actuelles :
1. Tout Réveil, et à plus forte raison toute Réforme, bouleverse toujours
Martin Luther en savait quelque chose ! L’opposition qu’il a rencontrée et les menaces dont il a fait l’objet le montrent clairement. Aussi a-t-il écrit : « Là où la Parole de Dieu est prêchée dans sa pureté et sa force, il ne peut manquer d’y avoir du bruit ! » Ce fut l’expérience de quasi tous ceux qui ont voulu apporter le Réveil : Calvin fut renvoyé de Genève en 1538 et ne put y revenir que trois ans plus tard. John Knox dut affronter l’opposition de la reine d’Écosse et fut lui aussi exilé. Le Réformateur suisse romand, Pierre Viret, fut empoisonné ; il ne mourut pas, mais sa santé fut définitivement ruinée.
Bien que son histoire soit moins tragique, le « Réveil de Genève » au 19e siècle connut aussi oppositions et souffrances : plusieurs des principaux leaders furent destitués, plusieurs pasteurs durent s’exiler et connurent la prison.
Je me pose la question suivante : nous qui prions pour le Réveil, sommes-nous prêts à affronter les oppositions, les menaces, le mépris, et parfois même, les persécutions qui accompagnent souvent le message revivaliste ? Nous voulons voir nos communautés grandir et nos contemporains venir à la foi, c’est merveilleux, mais ne croyons pas que ce message sera toujours bien compris. Cela ne nous apportera pas que des joies. Vouloir le Réveil, c’est entrer dans un combat, contre nous-mêmes d’abord : notre propre confort, notre volonté de « ne pas avoir d’histoires », notre timidité et parfois aussi notre lâcheté. Avons-nous déjà entendu une prédication sur cette parole de l’apôtre Paul : « Tous ceux qui veulent vivre pieusement en Jésus-Christ seront persécutés » ? (2 Timothée 3.12) Vouloir le Réveil, c’est aussi accepter d’être en butte à tous les immobilismes de nos institutions.
2. Réveils et action sociale
Un des reproches que l’on entend le plus souvent est que les Réveils sont des mouvements presque exclusivement spirituels qui ne s’intéressent pas, ou pas assez à l’action sociale. C’est vrai que les « réunions de Réveil » se limitent souvent à des appels à la conversion et que l’élément social est souvent absent. Or il est indéniable que la rencontre avec Dieu doit aussi être une rencontre avec le prochain. Dans ce sens-là, le Réveil de Genève est un excellent exemple. Si la première vague de Réveil a favorisé la relation avec Dieu, le retour à la Bible et la prédication du salut par la foi, la seconde vague de Réveil a également mis l’accent sur l’action sociale.
Adolphe Monod, surnommé « la voix du Réveil » a été destitué parce qu’il a osé dévoiler des injustices sociales parmi ses paroissiens, dont beaucoup étaient des industriels et des membres de la bonne société protestante lyonnaise.
John Bost a fondé les asiles de La Force. Son mot d’ordre était : « Tous ceux que l’on refuse ailleurs, je les accueillerai au nom de mon Maître ». Cette œuvre admirable existe toujours.
Les diaconesses sont aussi un mouvement issu de ce Réveil. Elles ont beaucoup œuvré dans les hôpitaux et amélioré la santé publique.
Henry Dunant a fondé la Croix Rouge. Il était secrétaire de l’Alliance évangélique de Genève. Il a été aidé par plusieurs personnalités du Réveil. Aujourd’hui, qui connaît encore les origines chrétiennes de la Croix Rouge ?
La Croix Bleue a été fondée un peu plus tard, par le pasteur Louis-Lucien Rochat, effrayé par les ravages de l’alcoolisme à son époque.
Pendant la première moitié du 19e siècle, une trentaine d’œuvres sociales ont été ainsi créées dans la mouvance du Réveil.
Mais il n’y eut pas que des œuvres sociales, nombreuses furent aussi les œuvres culturelles et intellectuelles.
Un Réveil est donc un engagement total, dans tous les domaines de la société. Il ne saurait y avoir les « spirituels » d’un côté et les « sociaux » de l’autre. C’est un tout. Le plus bel exemple est certainement Félix Neff, qui fut à la fois pasteur, évangéliste, terrassier, ingénieur, instituteur, agronome, pionnier.
Il transforma sa région montagneuse à tel point que 150 ans après sa mort on a pu dire de lui qu’il faisait partie du patrimoine du département des Hautes Alpes.
Bien sûr, tout le monde ne peut pas être Félix Neff, mais sommes-nous prêts, aujourd’hui, à cet engagement total, dans tous les domaines de la vie humaine ? Prêts à rejoindre nos contemporains dans toutes leurs souffrances et dans tous leurs besoins ? Cela demande une consécration totale et une volonté d’être proche et à l’écoute de toutes les classes de la population. Sommes-nous prêts à cela ? Mais n’est-ce pas ce à quoi nous engage l’Incarnation de Jésus ?
3. Réveil et retour du Christ
Enfin, pourquoi désirons-nous le Réveil ? Que cherchons-nous en priant pour le Réveil ? Voir les bancs de nos églises se remplir à nouveau ? Stopper la crise des ministères ? Retrouver le dynamisme et la foi conquérante de nos aïeux ? Tout cela est juste et bon, mais est-ce cela le but ultime de notre prière et de notre témoignage ?
La recherche du Réveil ne saurait être un but en soi. On ne cherche pas le Réveil pour le Réveil ! Ce n’est pas non plus la recherche du succès, ce qui serait une démarche bien intentionnée peut-être, mais quand même tournée sur l’humain. Notre orgueil pourrait se cacher jusque-là ! Une église nombreuse, aux œuvres et aux finances prospères ainsi qu’à la réputation excellente peut être une église morte ou infidèle comme l’église de Sardes ou celle de Laodicée dont l’Apocalypse nous parle ! (Apocalypse 3.1-6 et 14-22)
La prière pour le Réveil, c’est l’intercession pour le retour de Jésus. Quelle est la dernière prière de la Bible ? « Amen ! Viens, Seigneur Jésus ! » (Apocalypse 22.20)
Le but premier et ultime du Réveil est d’apporter la grâce du Christ au monde, de hâter la venue du Royaume de Dieu (2 Pierre 3.12) et de préparer l’Église pour le retour du Seigneur. N’est-ce pas ce que Jésus lui-même rappelle dans la fameuse parabole des dix vierges (Matthieu 25.1-13) : préparer l’épouse pour la venue de l’époux. Cela demande beaucoup de consécration, d’abnégation et de travail souvent humble et caché. Cela risque aussi de changer et de bouleverser nos priorités. Y sommes-nous prêts ? Mais c’est bien l’appel que Jésus nous adresse en nous demandant de prier dans l’oraison dominicale : « Que ton règne vienne ! ».