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135 | Octobre 1980L’unité : un seul cœur
Nous allons considérer différents aspects de l’unité dans le Corps de Christ et nous arrêter à certains obstacles à l’unité. Nous parlerons d’une seule Église, d’un seul Seigneur, d’un seul Esprit, d’une même pensée, et du besoin d’avoir un seul cœur.
Dans le livre des Actes nous lisons ces paroles: "la multitude de ceux qui avaient cru n’était qu’un cœur et qu’une âme. Nul ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais tout était commun entre eux" (Actes 4:32). Les croyants avaient un même cœur.
Et dans l’épître aux Philippiens: "Rendez ma joie parfaite, ayant un même sentiment, un même amour, une même âme, une même pensée. Ne faites rien par esprit de parti ou par vaine gloire, mais que l’humilité vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vous-mêmes. Que chacun de vous, au lieu de considérer ses propres intérêts, considère aussi ceux des autres. Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus-Christ: existant en forme de Dieu, il n’a point regardé son égalité avec Dieu comme une proie à arracher, mais il s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur" (Phil. 2, 2-7).
L’apôtre Paul nous lance ce défi d’avoir un même cœur et de ne rien faire par esprit de parti ou par vaine gloire. Nous avons à mettre de côté notre propre réputation, à considérer les autres comme étant au-dessus de nous-mêmes, à prendre sur nous le rôle de serviteur. Nous devons avoir le cœur, les sentiments et l’amour du Seigneur Jésus.
L’orgueil, obstacle à l’unité
Un des grands obstacles à l’unité, c’est l’orgueil: ne pas vouloir être connu pour ce qu’on est vraiment, et agir par égoïsme ou par gloriole. Oublier que nous sommes pécheurs et qu’en tant que chrétiens, nous faisons partie d’une communauté de pécheurs. L’orgueil entre dans notre cœur quand nous regardon les autres de haut, quand nous nous croyons meilleurs qu’eux, ou plus spirituels, plus près du Seigneur. Souvent, c’est le sentiment inconscient d’être meilleurs qu’une autre partie du Corps de Christ. Le diable ne vient pas à nous en brandissant un grand drapeau et en nous prévenant: "aujourd’hui, je vais te tenter par l’orgueil, fais attention!" L’orgueil s’infiltre inconsciemment, quand nous ne restons pas près de la croix. Jésus ne va pas non plus brandir un drapeau; si nous voulons rester près de lui, c’est parce que nous l’aimons, parce que nous voulons être comme lui, avec lui. Cette intimité de la communion est notre seule protection contre l’orgueil. L’orgueil est un problème spirituel. On ne peut pas le corriger en se livrant à des tests ou en apprenant des credos, on s’en débarrasse en restant près du Seigneur.
Si nous ne restons pas près du Seigneur, nous allons commencer à nous concentrer sur nos droits; au lieu de voir ce que Dieu a fait pour nous, nous allons commencer à exiger. L’orgueil nous fait comparer le présent avec le futur ou le passé. Nous regardons le passé et nous ne sommes pas satisfaits de ce que nous avons maintenant; ou bien nous regardons l’avenir et nous voulons qu’il soit meilleur. Voyez-vous, l’humilité est satisfaite de ce que Dieu fait maintenant, elle nous conduit à une profonde faim de Dieu. Elle nous met dans cette confiance de croire que Dieu a agi dans nos vies pour nous conduire là où nous sommes maintenant.
Lorsque nous avons des conflits, notre problème ne vient pas des autres, ou des circonstances, ou des lieux. Voyez-vous, Dieu a filtré dans la main de son amour les circonstances par lesquelles vous passez, il vous afflige au moyen des personnes dont vous avez besoin…
Comprenez-vous? On regarde celui-ci de haut, on a un problème avec celui-là, on n’arrive pas à supporter sa présence et on se dit: c’est lui, mon problème. Pas du tout, c’est nous. Dieu voit notre besoin et parce qu’il nous aime, il nous met avec douceur dans cette circonstance pour enlever ce problème. C’est étonnant comme le Seigneur met les personnes ensemble pour résoudre leurs problèmes mutuels! Il veut simplement nous frotter les uns contre les autres et nous, nous nous mettons en colère contre Dieu et contre les circonstances.
Le problème, c’est l’orgueil de notre cœur. L’orgueil produit une racine de dureté, il nous rend insensibles, sans amour. On regarde les autres de haut, on se concentre sur leurs faiblesses, leurs manquements, leurs erreurs, au lieu de se réjouir de ce que Dieu fait dans leurs vies. L’orgueil nous rend envieux de ce qu’ont les autres et en voyant le Seigneur bénir, nous pensons: c’est nous qui mériterions cela!
L’orgueil, source de division
Tout ce qui est autre chose que l’enfer, c’est la grâce. La Bible dit que si Dieu nous traitait selon nos iniquités, personne ne pourrait subsister (cf Ps. 130, 3). Nous ne méritons absolument rien de ce que nous avons. Aussi, quand de tels sentiments montent dans notre cœur, c’est que nous avons oublié la croix. Nous nous en sommes éloignés et nous croyons être ce que nous ne sommes pas.
L’orgueil est une chose terrible. Nous le portons dans notre cœur et cela conduit toujours à la division, ce sentiment d’être unique, de se croire élevé, ces sentiments d’envie, cet esprit exigeant. Il en résulte une dureté de cœur qui va diviser le Corps de Christ. Si vous avez été enfoncé par quelqu’un et que vous ne lui pardonnez pas, vous allez toujours vous endurcir. Le refus de pardonner mène à la rancœur (en allemand, le mot "rancœur" signifie: emporter avec soi) et donc si vous ne pardonnez pas à quelqu’un son péché, vous emportez ce péché avec vous. Et ce péché qu’il a commis et que Dieu pouvait lui pardonner, c’est vous qui le portez et c’est vous qu’il détruit. Si nous ne nous pardonnons pas entre frères et sœurs nous devenons durs, remplis d’amertume.
La Bible dit: "les sacrifices qui sont agréables à Dieu, c’est un esprit brisé" (Ps. 5 1:19). Le Seigneur ne s’intéresse pas à nos belles offrandes, notre travail, nos bonnes œuvres, notre spiritualité. C’est nous qu’il veut, tels que nous sommes, dans l’humilité.
Il n’y a pas de problème de division qui ne puisse être résolu par l’humilité. C’est le chemin de la croix, le chemin du serviteur. Si vous avez une relation rompue avec un parent, un ami, elle peut être restaurée par l’humilité.
Jésus nous libère par le chemin de l’humilité
"Si mon peuple s’humilie, s’il prie et cherche ma face et s’il se détourne de ses mauvaises voies, je l’exaucerai…" (2 Chron.7:14).
L’orgueil n’admet pas les erreurs et les fautes, mais il les justifie et les rejette sur les autres. Il nous met dans un état que la Bible appelle la séduction, et nous ne pouvons plus comprendre la vérité avec droiture. Abdias 3 nous dit: "l’orgueil de ton cœur t’a égaré!". L’orgueil nous trompe toujours. Comment nous en libérer? Y a-t-il une liberté dans le Seigneur Jésus? Je peux vous le certifier: Jésus va nous libérer par le chemin de l’humilité. Si nous voulons choisir le chemin de la croix, nous connaîtrons celui de la résurrection. Si nous voulons nous humilier devant Jésus au Calvaire, nous connaîtrons la puissance d’une vie ressuscitée. La seule victoire possible sur l’orgueil, c’est l’humilité.
Confessons notre besoin. Confessons-nous les uns aux autres (Jacq. 5:16). L’humilité conduit toujours à la victoire, c’est le chemin qui plaît au Seigneur. Il rabaisse l’orgueilleux et relève l’humble (cf Luc 1:52). Il aime ceux qui ont le cœur brisé et contrit. Et là où il y a un esprit d’humilité, nous pouvons avoir un seul cœur.
Cherchons l’unité au-delà de nos conflits
Un grand obstacle, résultat de l’orgueil, à l’unité du Corps de Christ, c’est la manie de nous étiqueter les uns les autres. Vous savez que le racisme religieux est bien pire que le racisme social ou politique; j’ai grandi dans un foyer pentecôtiste et, pendant des années, j’ai eu honte de dire que je venais de cette Église. Non pas à cause de mon père ou de ma mère, ni tellement à cause des gens, mais du fait de la réaction d’autres chrétiens: "À quelle église vas-tu? Mon père est un prédicateur pentecôtiste… Oh!"; leur réaction me faisait profondément mal. Aujourd’hui encore, je n’ai pas pleinement surmonté cette blessure dans mon cœur.
Parmi les conflits qui font obstacle à l’unité, il faut signaler les conflits de personnalité. De tels conflits sont des péchés, des non-sens, ils ont des racines spirituelles. On dit: je les aime "dans le Seigneur," mais autrement, je ne les aime pas…
Si votre réponse à cette difficulté n’est pas l’engagement et l’acceptation, cela devient un péché: vous rejetez cette personne, vous avez de la rancœur, la haine est entrée en vous. Lorsque de tels conflits demeurent, vont au-delà de l’étape de la tentation, il y a une racine spirituelle. On en arrive à ne plus se parler, ne plus se regarder, à s’éviter même. Est-ce chrétien?
Jésus veut mettre fin à ce genre de conflits, qui peuvent se produire pour quatre raisons:
1. Des droits auxquels on n’a pas renoncé et qu’on estime violés. Comment réagir? Par la colère ? L’amertume? La rancœur? L’attitude critique? Ce qui intéresse le Seigneur, ce n’est pas de savoir qui a tort et qui a raison, mais comment vous allez répondre. Il s’intéresse moins à nos actions qu’à nos réactions. Si vous réagissez par la bonté, la douceur, la patience, la miséricorde, la tendresse, vous avez répondu de la bonne manière.
2. Nous avons un esprit qui ne pardonne pas. La désunion dans le Corps de Christ vient moins d’un désaccord que d’un manque de pardon. Si nous savons pardonner, si nous réagissons par l’amour, il n’y a pas de conflit mais plutôt une épreuve, une tentation. À travers ces épreuves, Dieu veut nous dilater, nous apprendre à être davantage remplis d’amour.
3. Un manque de loyauté et d’engagement: on ne reste pas loyal à l’égard des personnes quand elles sont dans le besoin, quand elles ont des problèmes. Accepter loyalement une personne, c’est rester à ses côtés quand elle a des problèmes. Nous pouvons tous aimer des gens qui nous aiment, mais c’est difficile d’aimer quelqu’un qui n’est pas aimable, et c’est là l’épreuve de notre loyauté.
4. Les problèmes doctrinaux. Il y a tant de conflits à propos de la doctrine et de la foi! Les gens s’intéressent à la perfection doctrinale. Dieu s’intéresse à la perfection des cœurs. Bien des déclarations de foi disent qui est le Père, qui est le Fils, qui est l’Esprit, ce qu’est la Bible… je n’ai pas vu de gens argumenter sur l’humilité. Moi, j’insiste sur l’humilité dans le Corps de Christ. Souvent nous concentrons les arguments théologiques sur de faux domaines. Commençons par notre cœur: si notre cœur se met en ordre devant le Seigneur, notre doctrine se réglera d’elle-même, l’Esprit du Seigneur Jésus nous conduira dans la vérité tout entière. Je vois plusieurs raisons aux conflits doctrinaux mais la principale, c’est l’orgueil. Au fond, nous n’avons pas vraiment cru la vérité qui produit l’humilité.
Croire quelque chose avec notre tête, ce n’est pas la foi chrétienne. La foi chrétienne, biblique, ne sépare pas la tête du cœur et elle produit toujours l’obéissance. Ainsi, quand les gens disent: je crois au Père, au Fils et au Saint-Esprit, s’ils le croient d’une manière biblique, cela les conduira au pied de la croix, à une marche humble avec le Seigneur.
L’orthodoxie de notre vérité se mesure par l’amour que nous aurons pour les autres chrétiens. Dans quelle mesure devenons-nous humbles? Voilà l’étalon de mesure de Dieu. On se divise sur des points de doctrine, mais je n’ai jamais vu Jésus renvoyer quelqu’un sur cette base-là.
Quand la prostituée s’est trouvée devant le Seigneur Jésus, il ne lui a pas demandé: crois-tu que je suis le Messie? que j’accomplis toutes les prophéties? Crois-tu que l’Ancien Testament est la parole inspirée de Dieu? Il a simplement répondu à son cœur.
Quand le cœur est droit, il conduit l’homme à la vérité. Nous pouvons recevoir un bon enseignement, nous pouvons étudier la Parole, mais Dieu veut une réponse du cœur. Et si vraiment nous croyons à la vérité, elle nous conduira à l’humilité.
J’aime ce qu’a dit un grand Père de l’Église (St-Augustin): "dans les choses essentielles, Unité; dans les choses secondaires, Liberté; et en toutes choses Charité." Ayons un esprit enseignable et ne croyons pas trop vite tout savoir, sans avoir besoin des autres dans le Corps de Christ. Sachons souligner ce qui nous est commun, au lieu de nous arrêter surtout aux différences. Il arrive aussi qu’on manque terriblement de sagesse: je découvre quelque chose, je m’emballe et, rentré chez moi, j’assène cette vérité à mes proches: cela les fait fuir…
Ouvrons notre cœur pour partager
Comment puis-je t’aimer si je ne te connais pas? L’amour ne peut se contenter d’une attitude amicale superficielle, telle qu’on la vit trop souvent dans le monde. Si entre frères, nous partageons l’intime de notre cœur, l’humilité encourage l’humilité. Quand un frère vous ouvre son cœur, accueillez-le: ne le critiquez pas, ne le rabaissez pas, mais comprenez qu’il lui en coûte de vous dire cela. Encouragez-le et montrez-lui que vous lui êtes reconnaissant de ce partage si profond. Et répondez en lui ouvrant vous-même votre cœur.
Dieu nous appelle à l’humilité, il nous appelle à être son peuple. Non pas une organisation ni une machine. Son Église, c’est un peuple de pécheurs qui s’aiment, qui partagent entre eux tout ce qui les touche, qui se construisent les uns les autres et se guérissent mutuellement par leur amour.
Je sais que dans bien des cultures il ne sied pas de manifester son amour par des témoignages d’affection. Mais le christianisme va à l’encontre de telles cultures. Nous devons apprendre à être chaleureux, remplis d’affection. Dans la mesure où nous avons un cœur pur nous pouvons manifester avec ferveur notre affection les uns pour les autres. Cela ne veut pas dire qu’il faut embrasser des gens que vous ne connaissez pas! Mais notre Église, notre communauté est un lieu où peut se manifester notre amour aux personnes que nous connaissons. Nous avons besoin d’une telle chaleur, d’une affection exprimée. Dieu veut nous voir libérés de nos craintes et nous guérir les uns les autres au moyen de notre amour. Parfois il y a des bévues, il nous faut faire attention et discipliner tout cela. Mais les abus possibles ne doivent pas éliminer l’affection.
Vivons dans l’humilité, dans l’ouverture de cœur. Quand on entend un leader avouer son péché, on réalise alors qu’il est humain et que nous aussi, nous pouvons être libres. Cela nous libère pour nous ouvrir les uns aux autres. Bien sûr il faut de la sagesse, de la discrétion. Vous n’allez pas vous ouvrir à des personnes qui, vous le savez très bien, vont délibérément vous détruire. À moins que Dieu ne vous le demande, et il peut le faire. Dieu veut que son Église mette le feu au monde et nous le ferons par notre exemple. Si l’Église s’unit dans l’amour elle en sera remplie, elle sera purifiée et libre alors pour retrouver l’unité. Et la puissance de notre exemple instruira le monde.